Si l’exploitation des réseaux était, au moins au début, concédée à des compagnies privées, le département avait la charge de la conception et de la réalisation de l’infrastructure : voies, ouvrages d’art, bâtiments. Or, en 1901, juste au moment des études pour le premier réseau, Louis Harel de la Noë est nommé Ingénieur en chef des ponts et chaussées des Côtes-du-Nord.
Pour Harel de la Noë, c’était un retour au pays puisque, né à Saint-Brieuc en 1852, il y fait ses études avant de préparer Polytechnique à Paris. Reçu parmi les premiers à l’examen de sortie, il entre à l’école des Ponts et Chaussées. Il commence sa carrière d’ingénieur en 1875, en particulier dans la Sarthe où il réalise les tramways départementaux, avec un célèbre « pont en X ».
Le réseau des Côtes-du-Nord va permettre à cet homme exceptionnel et trop méconnu de relever un défi à la mesure de son talent de concepteur et de réalisateur : il s’agissait de construire au moindre coût un « vrai » chemin de fer, essentiellement en site propre, dans une région certes peu montagneuse, mais entaillée par de profondes vallées.
Il est vite apparu à Harel de la Noë que, plutôt que de réaliser des terrassements, il était plus économique de construire des ouvrages d’art, passerelles, ponts ou viaducs, en faisant appel aux techniques modernes du béton armé dont il avait été un des théoriciens. D’où les quelque 60 ouvrages d’art que le réseau comportait au total, pour la plupart sur les lignes côtières. La légèreté de ces ouvrages, qui était la marque du génie et de l’audace de Harel de la Noë, a surpris bien de ses contemporains.